Hörspiel ou face… à l’art radiophonique de Luc Ferrari

Ce n’est pas rare qu’on qualifie la musique, l’art de Luc Ferrari (1929-2005), de radiophonique. À la lecture de sa biographie officielle, on découvre qu’une tuberculose dans sa jeunesse le contraint à passer beaucoup de temps à l’écoute de la radio : qui sait si cela ait pu l’influencer par la suite ?… Pour l’usage des sons non musicaux et de la voix narrative ~ la voix parlée, et le texte, mais aussi la parole documentaire et, plus généralement, le réel (Les Danses organiques, Chantal ou le portrait d’une villageoise…), ces sons réels qu’il introduit en 1964 dans Hétérozygote, ce concept de narration (parmi la série des “concepts” qu’il explorera dans les dix dernières années de sa vie) indissociable de ses Presque rien dans lesquels l’immixtion de la voix du compositeur balise le temps de l’écoute…

Mais c’est aussi un fait : Luc Ferrari a beaucoup produit pour la radio, notamment outre-Rhin ~ WDR Cologne, SWF Baden-Baden, DKU Berlin… ~ d’où il a importé le Hörspiel, un genre mixte de sons, de musique et de parole. Malgré son flou sémantique constitutif, le Hörspiel orne toujours le fronton de la Muse en circuit, studio d’Alfortville fondé autour de Ferrari en 1982 qui organise tous les deux ans le Concours international d’art radiophonique qui porte son nom. Pourtant le Hörspiel reste méconnu dans la sphère francophone. C’est pourquoi nous sommes heureux de lui consacrer tout un dossier, constitué de trois articles :

Le premier, par Philippe Baudouin, réalisateur à France Culture et auteur d’ouvrages sur la radio, nous offre des repères historiques et esthétiques précieux pour comprendre le Hörspiel hier et aujourd’hui.

Le second, consacré spécifiquement à l’œuvre radiophonique de Luc Ferrari, donne la parole à des artistes et des compositeurs actuels qui eux-mêmes entretiennent une relation forte avec la radio. Chacun a été invité à choisir une pièce de Ferrari et en livre son expérience d’auditeur. Ainsi s’expriment Chantal Dumas, José Iges,  Irvic D’Olivier, Alessandro Bosetti, Lucien Bertolina, Götz Naleppa et François Parra. La documentariste Jacqueline Caux, auteure des entretiens et du film Presque rien avec Luc Ferrari, explore avec nous les relations de Ferrari à la radio.

Le troisième s’intéresse au “Concours international d’art radiophonique Luc Ferrari : composer le réel”. Nous poserons la question de l’actualité du Hörspiel aujourd’hui et de sa filiation (ou non) avec l’œuvre de Ferrari. Les propos des artistes récompensées au dernier concours, Dinahbird, Floy Krouchi et Sarah Boothroyd, seront introduits et éclairés par ceux de David Jisse, compositeur et directeur de la Muse en circuit.

PS : et pour combler l’attente, voici une petite introduction, en sons, à Luc Ferrari :

PILE…


… OU FACE ?


… ou encore, sur Ubuweb, l’émission hommage des 27 et 28 août 2005 par David Jisse sur France Culture.

3 Réactions

  • CHRISTIAN ROSSET dit :

    Luc était un musicien de son temps. C’est aussi simple que ça. Il a compris très vite que la radio ouvrait un espace de création et de relais extrêmement favorable à son travail. Et aussi, qu’en échange, la radio pouvait proposer une écoute du monde remettant en question toute certitude au sujet de ce qu’est le « réel ». Sinon, je dois constater que, bien que, jeune compositeur sous influence, j’ai été joué dans des concerts de musique instrumentale en même temps que lui dès les années 1977/78, notre relation s’est vraiment nouée plus tard, quand nous nous sommes retrouvés face au micro, à la radio. Puis quand j’ai participé au premier concours de Hörspiele. On a finalement bien plus parlé de radio que de « musique pure ». Et, je l’avoue, ça m’a fait un bien fou!
    Enfin un compositeur de premier plan qui ne hiérarchise pas les domaines et les genres! Il me manque.

  • CHRISTIAN ROSSET dit :

    Les mots « genre » et « mineur », on devrait pouvoir s’en passer. Voilà. On était bien d’accord là-dessus, je crois, avec Luc.

  • CHRISTIAN ROSSET dit :

    PS. Je découvre, grâce à vous, qu’une des émissions que j’ai consacrées à Luc Ferrari (un Opus de 1999, d’une durée de 85’env) a été mise en ligne sur Ubuweb (en même temps que l’ensemble des rediffusions que David Jisse avait programmées dans la foulée du décès de Luc – ça remplit les 2/3 de la deuxième soirée). Je suis à la fois content que cela soit à la disposition de nouveaux auditeurs, plutôt qu’enterré dans l’antre de l’Ina; et un peu désolé par la très mauvaise qualité du son (bien pire que celui d’une cassette d’époque)… J’espère qu’on jour, tout cela sera de nouveau audible avec un son digne. Enfin merci quand même à tous pour ce travail de remise à disposition.

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