« La libération des ondes » ou la radio soumise aux pouvoirs

La libération des ondes est le titre d’un documentaire télévisuel de Stéphane Manier et Vanessa Doussot, produit et diffusé en septembre 2014 par la chaîne LCP. Il retrace l’histoire de la relation entre le pouvoir et la radio en France.

Avant d’arriver au cœur de son sujet – la reprise en main de la radiodiffusion nationale lors de la libération de Paris en août 1944 –, le documentaire fait un retour chronologique sur la radio d’avant-guerre. Selon la sociologue Cécile Méadel, cette nouvelle technologie d’alors se développe grâce à d’anciens Poilus qui, ayant appris la technique au front, se prennent de passion pour la construction de leurs propres « TSF » une fois revenus à la vie civile. Le bouillonnement de ces radios libres avant l’heure se stabilise dans les années 30 lorsque l’État décide de partager le gâteau hertzien entre public et privé, préfigurant le paysage que l’on connaît actuellement. Mais le second conflit mondial expose plus intensément le pouvoir de la radio lorsqu’elle est utilisée comme arme de combat. Pour l’historienne Aurélie Luneau, la reconquête de la radiodiffusion nationale des mains des Nazis et des collaborateurs sera un enjeu majeur de la libération de la France. Karine Le Bail, historienne et ancienne productrice des Greniers de la Mémoire sur France Musique, évoque les trois figures qui émergent de cette histoire : Jean Guignebert, Pierre Crénesse et surtout Pierre Schaeffer, à la tête d’un laboratoire de création, chargé de préparer clandestinement cent heures de programmes ininterrompus pour le jour J et les suivants.

La seconde partie du documentaire, plus décevante, relate d’abord la période du monopole de l’État sur les ondes, depuis 1945 jusqu’aux années 1970, où la radio est avant tout l’instrument politique des gouvernements successifs. L’éclatement de l’ORTF en 1974 est très rapidement évoqué et uniquement présenté comme positif. Ce que l’on pourrait alors appeler « la seconde libération des ondes », fin 70 début 80, où le combat dans l’illégalité de collectifs et d’associations aboutit à leur légalisation en 1981, est quasiment présentée comme une victoire personnelle de François Mitterrand. L’épisode des radios libres légalisées est totalement ignoré. La libéralisation des ondes et la main mise de l’argent sur les radios privées tombent pour ainsi dire du ciel, au profit d’une conclusion hâtive où le secteur associatif n’existe pas, tant pour les documentaristes que pour Jean-Noël Jeanneney, ancien président de Radio France et ancien secrétaire d’État à la Communication qui, du haut de la Tour Eiffel, offre le dernier mot au pouvoir institutionnel.

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